Compte rendu de la réunion du GT Sciences & Academia du 28 octobre 2011 (Paris)

ENS Ulm

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Participants
 Présents : Ian Bell, Geneviève Bordet, Peter Follette, Christopher Gledhill, Diana Karel-Longuevergne, Monique Mémet, Elsa Pic, Christina Reed, Anthony Saber
 Excusés : Patrick Bachschmidt, Susan Birch-Becaas, Shirley Carter-Thomas, Dacia Dressen-Hammouda, Laura Hartwell, John Humbley, Natalie Kübler, Grégoire Lacaze, Hélène Laffont, Nicole Lancereau-Forster, Corinne Landure, Elizabeth Rowley-Jolivet, George Sosin
 

Travaux du matin : autour de la vulgarisation scientifique en langue anglaise


 La matinée a été consacrée à un exposé très enlevé de la journaliste scientifique Christina REED, qui est actuellement directrice de rédaction pour le site internet de vulgarisation scientifique Discovery News. Christina commence par donner des indications sur son parcours : passionnée de biologie marine, elle a étudié ce domaine à l'université, mais souhaitait concilier ce centre d'intérêt avec une autre passion, à savoir la littérature et l'écriture. Elle s'est donc très vite tournée vers le journalisme scientifique, en suivant une formation en « science journalism » dans une université new-yorkaise. Ses premiers pas dans ce métier l'ont conduite à travailler en tant que pigiste pour le magazine Scientific American. Par la suite, elle a également rédigé des articles pour d'autres publications, notamment New Scientist, Science, Nature. Elle a collaboré en 2003 avec le réalisateur James Cameron en tant que coordinatrice scientifique pour le film Aliens of the Deep.
 
Elle est l'auteur de deux ouvrages, Earth Science: Decade by Decade et Twentieth-century Marine Science: Decade by Decade.
 
Voir ces ouvrages sur :
 
http://tinyurl.com/books-ChristinaReed
 
Selon Christina, l'article de vulgarisation est aujourd'hui un « produit » (« think of your stuff as a product », tel est, de nos jours, le mot d'ordre). Christina ne se décrit d'ailleurs pas comme editor, mais préfère le terme producer.
 
Christina, qui anime une équipe de plusieurs pigistes, a détaillé le processus de fabrication d'un article de vulgarisation avant sa mise en ligne : lorsque l'article « brut » est prêt au moins 24 heures avant une éventuelle publication, il passe par le filtre des copy editors et des fact checkers, suivant une procédure de validation qui se rapproche de celle qui est en vigueur dans la presse écrite de haut niveau. En revanche, lorsque, en raison d'une actualité brûlante, un article doit être publié en moins de 24 heures, le processus de rédaction est plus collaboratif : des outils de gestion des contenus (content management systems) sont mobilisés, notamment les sites de blogging professionnel WordPress et TypePad, ainsi que l'outil de pilotage de projet KaPost. La rédaction du texte est souvent collective (« all writers pitch in »), Christina intervenant pour valider les contenus, avant de publier en ligne (« before going live »). Il est important de veiller au délai de fabrication de l'article, car celui-ci ne peut être soumis après une heure limite (« the embargo »).
Les premiers commentaires des lecteurs sont également importants (« As soon as it goes live, I check the first comments ») et peuvent donner lieu à des modifications dans un article déjà mis en ligne.
 
Christina évoque ensuite les stratégies de rédaction : comment faut-il s'y prendre pour attirer l'attention d'un lectorat qui, à l'ère du numérique et des réseaux, est déjà bombardé d'informations toute la journée ? L'une des approches possibles consiste à partir de faits quotidiens : pourquoi le rideau de douche bouge-t-il lorsqu'on fait couler l'eau dans la baignoire ? Cette question, posée dans la première phrase d'un article, permettrait d'introduire des phénomènes scientifiques complexes, tels que la convection. Plus généralement, la structure des articles est « en pyramide inversée » : si le journaliste scientifique veut faire état d'un résultat obtenu par des chercheurs, il exposera l'enseignement majeur de leur travaux en tête d'article, sous une forme amusante (« Your lead is the conclusion »). Il faut également jalonner l'article de « kickers », c'est-à-dire des ruptures de ton ou des éléments nouveaux qui relancent l'attention du lecteur. Les effets de surprise sont également recherchés (Christina les appelle des « A-ha / Wow moments »).
Il faut également veiller à la concision de l'ensemble, les articles de vulgarisation publiés sur Discovery News dépassant rarement 300 mots. L'information est organisée dans l'article selon un système de questions/réponses (« The Q&A is very important. Anticipate what you reader wants to know »).
 
Au plan stylistique, la simplicité est de mise (« No extra fluff, we want to pop »). Les verbes sont privilégiés pour évoquer les faits ; en revanche, les adjectifs doivent être utilisés avec parcimonie. Christina déconseille également à ses contributeurs d'utiliser un trop grand nombre de métaphores, qui peuvent déformer le message scientifique de l'article. Enfin, une très grande liberté est accordée aux pigistes pour les titres, qui doivent jouer le rôle d'accroche, et peuvent être humoristiques.
 
Pour trouver des idées d'articles, les pigistes suivent l'actualité scientifique sur des sites proposant des dépêches, tels que Eureka Alert (http://www.eurekalert.org/). Ils surveillent aussi les communiqués de presse des grands organismes internationaux, qui « prémâchent » le travail des journalistes scientifiques (Christina, il y a quelques années, a rédigé ce type de communiqués de presse en tant que chargée de mission à la Commission océanographique internationale de l'UNESCO).
 
Le remarquable exposé de Christina, souvent interrompu par des questions, a été suivi d'un débat animé autour de la vulgarisation scientifique.

 

Travaux de l'après-midi : compte-rendu d'une enquête préalable relative à un projet de dictionnaire des notions de l'anglais de spécialité

Dans le prolongement du projet sur l'épistémologie de l'anglais de spécialité présenté lors de la dernière réunion du GT S&A à Dijon, A. Saber expose les enseignements d'un questionnaire proposé à l'ensemble des membres du GERAS ainsi qu'à un certain nombre d'acteurs de l'anglais de spécialité en France.
 
Un compte-rendu détaillé de ce questionnaire est en cours de finition et sera envoyé aux répondants ainsi qu'aux membres du GT S&A avant la mi-novembre 2011.
 
Voici en résumé les principaux enseignements de ce questionnaire (et des débats lors de la réunion qui fait l'objet du présent compte rendu) :

  •  43 personnes ont répondu au questionnaire ;
  • le projet a paru utile à la quasi-totalité des répondants ;
  • d'ores et déjà, une vingtaine de collègues ont pris l'engagement ferme de rédiger une ou plusieurs rubriques ;
  • près d'une centaine de notions supplémentaires ont été proposées par les répondants ;
  • les débats lors de la réunion ont permis d'établir un cahier des charges provisoire (critères de sélection des notions, nécessité de renommer certaines d'entre elles pour les relier à un contexte anglophone spécialisé, typologie des rubriques...).

Le projet semble donc viable ; il sera proposé dans un premier temps à l'éditeur Ophrys.
 
La réunion s'achève sur une ébauche de programme en vue du prochain regroupement du GT à Grenoble : suite au récent message de Jean-Claude Bertin à propos des GT, il conviendrait de consacrer la prochaine réunion à l'élaboration d'une fiche d'identité du GT, à un inventaire des chantiers communs à ses membres, et à la définition du « mode de gouvernance » du GT (avec la désignation d'un ou plusieurs responsables par le biais d'une élection formelle).
 
Compte rendu rédigé par Anthony Saber le 4 novembre 2011.